5 octobre 2017
12h30 – 15h30
Amphi 3 – Campus de Jacob Bellecombette
Entrée libre
Les LIP, L’imagination au pouvoir, 2007, de Christian Rouaud
Documentaire exceptionnel et extrêmement réussi, ce film porte sur un conflit social original, l’un des plus populaires et des plus médiatisés de l’après 1968, le conflit de l’usine LIP à Besançon, capitale, alors, de l’horlogerie française. Leçon d’histoire et de mobilisation politique, ouverture sur le monde des coopératives et de l’entrepreneuriat alternatif, plongée dans les dimensions intimes et genrées du militantisme : les niveaux et clefs de lecture de ce témoignage hors normes sont multiples. Et si nul, jamais, ne ressort indifférent de sa projection, c’est cependant aujourd’hui encore le mot d’ordre bannière de la résistance des 1300 employés qui étonne, irrite, ou interpelle le plus : « On fabrique, on vend, on se paie. C’est possible ». Une autre vision du sens de l’entreprise et du travail que celle qui s’est imposée depuis, en somme.
Parmi les multiples pistes d’approfondissement qu’offre le documentaire, en outre de celles que pourront faire émerger les questions, on privilégiera ici deux grands
thèmes.
Le premier thème consistera à replacer rapidement l’aventure des LIP dans son histoire proche et dans celle, plus longue, des « modes d’action » ou « répertoires d’action collective » selon l’expression du sociologue américain Charles Tilly. A cet égard on évoquera le développement et les usages des deux modes d’action emblématiques du cas LIP que sont la grève et l’occupation de locaux, et plus incidemment les modalités de détournement festifs et conviviaux, dont cet exemple témoigne également.
Pour aller plus loin :
- Sur le droit de grève aujourd’hui [cliquez ici] et [ici]
- Sur les « répertoires d’action collective », très pédagogique et bien fait [cliquez ici]
« Vous avez su démontrer une nouvelle fois que si les patrons ne peuvent jamais se passer des ouvriers, les ouvriers peuvent des passer des patrons ! »
La phrase de Georges Séguy, alors secrétaire général de la CGT, reflète moins la position durant le conflit LIP, assez attentiste et gênée, de ce syndicat, que l’une des idées les plus anciennes et tenaces du monde ouvrier européen : le thème de l’autoorganisation du travail. Ce thème peut être rattaché comme on l’évoquera rapidement à la longue histoire des coopératives et du mouvement coopératif. Dès le XIXe siècle, l’idée des coopératives se présente en effet comme celle d’une alternative à la fois au capitalisme et au collectivisme, et elle doit être associée à celles d’associations et de mutuelles. Sa portée est réelle aujourd’hui encore même si ses réussites sont demeurées en définitive assez limitées. Parmi ses objectifs et postulats principaux on retiendra la propriété collective des moyens de production, la démocratie interne (un homme/une femme – une voix), et plus largement la transparence et une vision non hiérarchique. On fera également le lien avec la notion de « l’autogestion », très présente dans les années 1970.
Pour en savoir plus :
- voir d’abord le grand livre de référence d’André Gueslin, L’invention de l’économie sociale : idées, pratiques et imaginaires coopératifs et mutualistes dans la France du XIXème, Economica, 1987 (2ème édition en 1998).
- Pour la période actuelle et la France, plus simple et pédagogique, mais juste, parmi beaucoup d’autres [cliquez ici]
En version plus officielle du mouvement coopératif français [cliquez ici]
+ D’infos [cliquez ici]